LOI
ORGANIQUE N° 99-70 DU 17 FEVRIER 1999
sur
la Cour des
comptes
(J.O. n° 5845, p. 795)
L'Assemblée
nationale a délibéré et adopté en sa séance du mercredi 13 janvier 1999, à la
majorité absolue des membres la composant ;
Le Conseil
constitutionnel a déclaré conforme à
la Constitution par sa décision n°1-C-1999 du 3
février 1999 ;
Le Président de
la République
promulgue la loi organique dont la teneur suit :
CHAPITRE
I
Dispositions
générales
Article
premier. La présente loi
organique régit l'organisation, les compétences, le fonctionnement et les
procédures de
la Cour
des comptes, juridiction financière et institution supérieure de contrôle des
finances publiques.
Article 2.
La
Cour des
comptes juge les comptes des comptables publics et assiste le Parlement et le
Gouvernement dans le contrôle de l'exécution des lois de finances.
Article 3.
La Cour des comptes contribue par son action
permanente de vérification, d'information et de conseil à la réalisation des
missions suivantes :
- la
sauvegarde du patrimoine public et le contrôle de la sincérité des finances
publiques ;
- l'amélioration
des méthodes et techniques de gestion ;
- la
rationalisation de l'action administrative.
Elle s'assure
de la régularité des opérations de recettes et de dépenses des organismes contrôlés
et, le cas échéant, réprime les manquements aux règles qui régissent lesdites
opérations.
Elle vérifie et
apprécie le bon emploi des crédits et la gestion de l'ensemble des organismes
soumis à son contrôle.
La Cour établit un rapport général public annuel
reprenant les principales observations qu'elle a faites dans l'année et les
mesures préconisées pour y remédier.
Article 4. Les contrôles dévolus à
la Cour des comptes visent à :
- déceler
toute irrégularité ou infraction par rapport aux normes juridiques et de
gestion en vigueur de manière à permettre, dans chaque cas, de prendre les
corrections nécessaires, d'engager la responsabilité des personnes en cause,
d'obtenir réparation ou de décider des mesures propres à éviter pour l'avenir
la répétition de tels actes ;
- favoriser
l'utilisation régulière et efficiente des ressources et à promouvoir
l'obligation de rendre compte et la transparence dans la gestion des Finances
publiques.
CHAPITRE II.
De l'organisation de
la Cour des comptes
Article 5.
La Cour des comptes se compose des magistrats qui
sont :
- le Président
de
la Cour ;
- les
présidents de chambre ;
- les
chefs de section ;
- les
conseillers maîtres ;
- les
conseillers référendaires ;
- les
conseillers.
Le nombre de
magistrats constituant
la Cour
est fixé par décret.
Article 6. Les magistrats de
la Cour des comptes jouissent de
l'inamovibilité prévue en faveur des magistrats du siège des cours et tribunaux
de
la République
et sont régis par un statut particulier défini par une loi organique. Ils sont
nommés par décret après avis du Conseil supérieur de
la Cour des comptes.
Article 7. Le ministère public est exercé par le
commissaire du Droit. Il peut être assisté d'un commissaire adjoint choisi
parmi les magistrats de
la Cour
des comptes, sur proposition du commissaire du Droit et après avis du Président
de
la Cour.
Le commissaire
du Droit ou le commissaire adjoint sont nommés par décret. Il est mis fin à
leurs fonctions dans les mêmes formes.
Article 8. Les formations de
la Cour des comptes sont :
- l'audience
plénière solennelle ;
- les
chambres réunies ;
- la
chambre de discipline financière ;
- les
chambres.
En cas de
besoin, des sections peuvent être constituées à l'intérieur de chaque chambre.
La Cour comprend, en outre, deux formations
consultatives :
- le
comité des rapports et des programmes ;
- la
conférence des présidents et du commissaire du Droit.
Enfin,
la Commission de Vérification
des Comptes et de Contrôle des Entreprises publiques, organe de contrôle
autonome, constitue une chambre au sein de
la Cour. Le magistrat qui la
préside a rang de Président de chambre.
Article 9. Le Président de
la Cour préside l'audience
plénière solennelle, les chambres réunies, et les organes consultatifs. Il peut
en outre présider les séances des chambres ou des commissions internes.
Il assure
la Direction générale de
la Cour, en organise et
coordonne les travaux. Il est assisté d'un Secrétaire général qui est choisi
parmi les magistrats de
la Cour
et qui est nommé par décret sur sa proposition.
Il arrête le
programme annuel d'activité préalablement délibéré en comité des rapports et
des programmes. Il le transmet au Président de
la République.
Il signe les
arrêts et décisions rendues sous sa présidence.
Il fait
connaître au Président de
la
République, au Premier ministre et aux ministres compétents
les observations formulées par
la
Cour, par voie de référés.
Il exerce les
prérogatives qui lui sont dévolues par la présente loi par décision,
ordonnance, ordonnance prise en chambres réunies, notes ou référés.
Il est chargé,
après délibération des chambres réunies, de la mise en place et du suivi du
règlement intérieur de
la Cour.
Il remet le
rapport général annuel au Président de
la République et aux Présidents de l'Assemblée nationale
et du Sénat.
Il dépose le
rapport sur la loi de règlement et la déclaration de conformité sur le bureau
du Président de l'Assemblée nationale et les transmet au Président du Sénat et
au ministre chargé des Finances, pour information. Ils sont aussitôt annexés au
projet de loi de règlement.
Il représente
la Cour auprès des autorités
sénégalaises, des pays étrangers et des organisations internationales. Il a en
charge les relations avec les institutions supérieures de contrôle des finances
publiques des pays étrangers et leurs groupements associatifs. Il peut
contracter avec toutes les organisations internationales qui peuvent lui
confier des missions dans le cadre des compétences et des capacités d'expertise
de
la Cour.
Article 10. Le Président de
la Cour administre les services
de
la Cour et
assure la gestion des personnels et des moyens affectés à cette institution.
Le projet de
budget est préparé, chaque année, par le Président de
la Cour et soumis à la
conférence des Présidents et du commissaire du Droit.
Les crédits
inscrits au budget de l'Etat figurent sous un chapitre particulier.
Le Président de
la Cour rend
compte de l'utilisation annuelle des crédits à la conférence des Présidents et
du commissaire du Droit sur rapport d'un magistrat désigné chaque année par le Président.
Article 11. Avant d'entrer en fonction, le Président
de
la Cour est
installé au cours d'une audience plénière solennelle, présidée par le doyen de
cette juridiction, en présence du Président de
la République. Il
prête le serment solennel suivant : "Je jure de bien et loyalement remplir
mes fonctions de magistrat, de les exercer en toute impartialité dans le
respect de
la
Constitution et des lois de
la République, de garder
scrupuleusement le secret des délibérations et des votes, de ne prendre aucune
position publique, de ne donner aucune consultation à titre privé sur les
questions relevant de la compétence de la juridiction et d'observer en tout la
réserve, l'honneur et la dignité que ces fonctions imposent".
Les nouveaux
magistrats prêtent le même serment, lors de leur nomination, en audience
plénière solennelle.
De la même
façon, le commissaire du Droit prête, lors de sa nomination, en audience
plénière solennelle, le serment suivant : "Je jure de bien et loyalement
remplir mes fonctions de commissaire du Droit, de les exercer en toute
impartialité dans le respect de
la Constitution et des lois de
la République, de garder
scrupuleusement le secret des délibérations et des votes, de ne prendre aucune
position publique, de ne donner aucune consultation à titre privé sur les
questions relevant de la compétence de la juridiction et d'observer en tout la
réserve, l'honneur et la dignité que ces fonctions imposent".
Article 12. En cas d'empêchement ou d'absence, le Président
est suppléé par le plus ancien des Présidents de chambre dans l'ordre de
nomination à
la Cour.
Article 13. Le commissaire du Droit bénéficie en
tant que de besoin des services administratifs de
la Cour.
Il est présent
ou représenté dans les formations consultatives de
la Cour quand il n'en est pas
membre.
Il veille à la
bonne application des lois et règlements au sein de l'institution supérieure de
contrôle.
Il adresse des
conclusions écrites et des réquisitions écrites ou fait des observations orales
complémentaires aux différentes formations juridictionnelles. Lui sont
obligatoirement communiqués tous les rapports ou arrêts, gestions de fait,
saisines de faute de gestion et pourvois en révision ou cassation, pour avis.
Il peut
communiquer directement avec les autorités administratives ou judiciaires par
notes du Parquet.
Il tient l'état
des ordonnateurs et des comptables publics ainsi que des services de l'Etat,
des collectivités locales et des entreprises ou organismes assujettis au
contrôle de
la Cour.
Il est informé
par le secrétaire général des retards dans la production des comptes et des
pièces justificatives.
Il est consulté
par le Président de
la Cour
avant toute décision de destruction des liasses.
Il défère à
la Cour les opérations présumées
constitutives de gestion de fait ou les actes susceptibles de relever de la
chambre de discipline financière.
Il requiert
l'application des amendes prévues par la loi organique sur
la Cour des comptes.
Il suit, en
relation avec les services habilités du Ministère chargé des Finances,
l'exécution des arrêts et décisions de
la Cour.
Article 14. Le Secrétaire général, assisté du
greffier en chef, veille à la production des comptes dans les délais
réglementaires et avise le commissaire du Droit en cas de retard.
Il assiste le Président
de
la Cour dans
la coordination des travaux de l'institution et dans l'organisation des
audiences des formations de
la
Cour.
Il dirige, sous
l'autorité du Président, les services administratifs de
la Cour et du greffe.
Il notifie tous
les jugements de
la Cour
et certifie les copies et extraits des actes juridictionnels de celle-ci.
Article 15.
La
Cour des
comptes siège en "audience plénière solennelle", notamment pour
procéder à l'installation des magistrats dans leurs fonctions, pour approuver
le rapport général annuel, le rapport sur la loi de règlement et la déclaration
de conformité, pour l'ouverture de son activité annuelle ou pour d'autres
motifs, sur un ordre du jour particulier arrêté par le Président. Y assistent
l'ensemble des magistrats ainsi que le commissaire du Droit et le commissaire adjoint.
Article 16.
La
Cour siège
"en chambres réunies" pour :
- formuler
des avis sur les questions importantes de procédure ou de jurisprudence ;
- juger
des affaires qui lui sont déférées par le Président de
la Cour, sur renvoi d'une
chambre, sur réquisition du commissaire du Droit, sur renvoi après cassation ou
sur recours en révision d'un arrêt de la chambre de discipline financière ;
- arrêter,
avant approbation en audience plénière solennelle ;
- le
texte du rapport sur le projet de la loi de règlement ;
- le texte
de la déclaration générale de conformité ;
- le
texte du rapport général annuel.
- statuer
sur l'amende prévue à l'article 30 de la présente loi.
Les chambres
réunies sont, en outre, saisies par le Président de
la Cour, de tout problème
d'organisation et de fonctionnement de l'institution.
Les chambres
réunies se composent du Président de
la
Cour, des Présidents de chambre, du Président de
la Commission de Vérification
des Comptes et de Contrôle des Entreprises Publiques (C.V.C.C.E.P.), des chefs
de section et de deux magistrats de chaque grade élus par leurs collègues pour
deux ans. Elles sont complétées, pour chaque affaire par un magistrat
rapporteur qui a voix consultative.
Le commissaire
du Droit et le Secrétaire général assistent aux séances ainsi que le greffier
en chef.
Article 17.
La
Cour des
comptes est organisée en chambres dont le nombre est fixé par décret, sur
proposition du Président de
la
Cour.
Chaque chambre
est formée d'un Président de chambre, de chefs de section s'il y a lieu, de
conseillers maîtres, de conseillers référendaires et de conseillers.
Article 18. Les présidents de chambre sont chargés
de présider une des chambres de
la
Cour.
Leur
affectation ainsi que celles des magistrats, la division des chambres en
sections et les compétences respectives de chaque chambre sont décidées par
ordonnance du Président, prise en chambres réunies.
Article 19. Les chambres ou les sections de chambre
siègent en audience, avec, au minimum, trois magistrats de la chambre y compris
le Président de chambre ou le chef de section.
Le conseiller
rapporteur assiste à l'audience avec voix délibérative. Le greffier de la
chambre est présent et rédige le procès verbal de la séance.
En l'absence de
quorum, il peut être fait appel à un magistrat d'une autre chambre.
Article 20. Les Présidents de chambre dirigent les
activités de leurs chambres. A ce titre, ils :
- président
les audiences et réunions de leur chambre ;
- dirigent
les personnels affectés dans leur chambre ;
- soumettent
au Président de
la Cour,
leurs propositions en vue de l'établissement du programme annuel d'activité et
assurent la mise en œuvre et le suivi du programme approuvé ;
- répartissent
les dossiers entre les membres de leurs chambres et veillent à leur traitement
dans les meilleurs délais ;
- informent
régulièrement le Président de
la
Cour sur l'état d'exécution des travaux en cours et lui
proposent toutes mesures propres à accroître les performances de la juridiction
;
- s'assurent
de la qualité des travaux effectués, en veillant à la formation permanente des
membres placés sous leur autorité et à l'application des méthodologies ou
normes de vérification adoptées par
la
Cour ;
- transmettent
au Président de
la Cour
les projets de référés et d'insertions au rapport général annuel émanant de la
chambre.
Article 21. Le comité des rapports et des programmes
est chargé de la préparation et de la présentation des rapports prévus à
l'article 16.
Il est composé
du Président de
la Cour,
du commissaire du Droit, des Présidents de chambre, du Président de
la C.V.C.C.E.P., du rapporteur
général désigné pour chaque rapport et du secrétaire général de
la Cour. Le Président peut y
désigner d'autres magistrats de
la
Cour, en fonction des insertions proposées par les chambres.
Article 22. La conférence des présidents et du
commissaire du Droit est composée du Président de
la Cour, du commissaire du
Droit, des Présidents de chambre, du Président de
la C.V.C.C.E.P. et du greffier en
chef. Le secrétaire général tient le secrétariat et a voix consultative. Elle
est consultée, à l'initiative du Président de
la Cour, sur l'organisation, les
travaux et l'activité générale de l'institution.
Article 23.
La
Cour peut
disposer de rapporteurs particuliers dont elle assure la formation dans les
conditions et selon les modalités définies par ordonnance du Président, prise
en chambres réunies.
Ces rapporteurs
sont soit contractuels soit fonctionnaires ou agents non fonctionnaires et
choisis en fonction de leurs compétences particulières dans les contrôles
programmés par
la Cour. Ils
ont pour mission de participer aux travaux de vérification des comptes et aux
contrôles sur place et sur pièces, sous la direction et la responsabilité des
magistrats instructeurs.
Ces rapporteurs
particuliers, placés durant leur mission sous l'autorité hiérarchique du Président
de
la Cour, sont
affectés auprès des Présidents de chambre. Ces personnels ne sont pas membres
de
la Cour et ne
peuvent y exercer aucune activité juridictionnelle. Ils sont assujettis à
l'obligation du secret professionnel et bénéficient de la même protection que
les magistrats dans l'exercice de leur mission. Leurs conditions de service et
de rémunération sont fixées par décret.
La Cour des comptes peut, en outre, recourir,
pour des enquêtes de caractère technique, à l'assistance d'experts désignés par
le Président de
la Cour. Ces
experts sont assujettis à l'obligation du secret professionnel dans la mission
qui leur est confiée. Ils sont rémunérés sur vacations dont les taux sont fixés
par décret.
Article 24.
La
Cour peut
également disposer, par voie de détachement ou de mise à disposition, des
fonctionnaires ou agents non fonctionnaires qualifiés en matière juridique,
fiscale, douanière, économique, comptable et financière pour exercer les
fonctions d'assistant. Ils ne sont pas membres de
la Cour et ne peuvent y exercer
aucune fonction juridictionnelle. Ils ont pour mission de seconder les
magistrats ou les rapporteurs particuliers dans les missions dont ils ont la
responsabilité. Ils sont assujettis à l'obligation de secret professionnel.
Leurs conditions de service et de rémunération, la durée renouvelable des
fonctions varient selon les capacités et l'expérience de chaque assistant et
sont fixées dans leur arrêté de nomination.
CHAPITRE III.
De la compétence
de
la Cour
Article 25. Sous réserve des dispositions de
l'article 34 ci-après,
la Cour
juge les comptes des comptables principaux. A l'égard de
la Cour des comptes, est
comptable public tout fonctionnaire ou agent ayant qualité pour exécuter au nom
d'un organisme public des opérations de recettes, de dépenses ou de maniement
de titres, soit au moyen des fonds et valeurs dont il a la garde, soit par
virements internes d'écritures, soit par l'entremise d'autres comptables
publics ou de comptes externes de disponibilités dont il ordonne ou surveille
les mouvements.
La Cour juge également les comptes que lui
rendent les personnes qu'elle a déclarées comptables de fait. Est réputé
comptable de fait toute personne qui effectue, sans y être habilitée par une
autorité compétente, des opérations de recettes, de dépenses, de détention ou
de maniements de fonds ou valeurs appartenant à un organisme public. Il en est
de même de toute personne qui reçoit ou manie directement ou indirectement, des
fonds ou valeurs extraits irrégulièrement de la caisse d'un organisme public et
de toute personne qui, sans avoir la qualité de comptable public, procède à des
opérations sur les fonds ou valeurs n'appartenant pas aux organismes publics
mais que les comptables publics sont exclusivement chargés d'exécuter en vertu
des lois et règlements en vigueur.
Les gestions de
fait entraînent les mêmes obligations et responsabilités que les gestions
patentes et sont jugées comme elles.
Toute personne
déclarée gestionnaire de fait, sauf si elle est poursuivie pour les mêmes faits
au pénal, peut être condamnée à une amende, pour immixtion dans les fonctions
de comptable public. Le montant de cette amende est fixé suivant l'importance
et la durée du maniement ou de la détention des deniers. Son maximum ne pourra
dépasser le total des sommes indûment détenues ou maniées.
Article 26.
La Cour des comptes assiste le Parlement et le
Gouvernement dans le contrôle de l'exécution des lois de finances.
Elle contrôle
la régularité et la sincérité des recettes et des dépenses décrites dans les
comptabilités publiques. Elle s'assure du bon emploi des crédits, fonds et
valeurs gérés par les services de l'Etat et par les autres organismes publics.
Constituent des organismes publics au sens de la présente loi, l'Etat, les
collectivités locales et leurs établissements publics.
Elle effectue toute enquête complémentaire qui pourrait lui être demandée par
le Parlement à l'occasion de l'examen ou du vote du projet de loi de règlement.
Article 27.
La Cour des comptes, par l'intermédiaire de
la Commission de
vérification des comptes et de contrôle des entreprises publiques, vérifie les
comptes et contrôle la gestion des entreprises du secteur public selon les
catégories ci-après désignées :
- les
établissements publics à caractère industriel et commercial,
- les
établissements publics à caractère scientifique et technologique ;
- les
établissements publics professionnels ;
- les
établissements publics de santé ;
- les
autres établissements publics dont la création sera décidée ultérieurement ;
- les
sociétés nationales,
- les
sociétés anonymes à participation publique majoritaire.
De la même
façon, elle peut vérifier les comptes et la gestion de tout organisme dans
lequel l'Etat ou les organismes soumis au contrôle de
la Cour, détiennent, directement
ou indirectement, séparément ou ensemble, une participation au capital social
permettant d'exercer un pouvoir prépondérant de décision ou de gestion.
La Cour contrôle les institutions de sécurité
sociale, y compris les organismes de droit privé qui assurent en tout ou en
partie la gestion d'un régime de prévoyance ou de retraite légalement
obligatoire.
Elle s'assure
en outre que les administrations centrales, les services déconcentrés de
l'Etat, les sociétés nationales, les établissements publics et les
collectivités locales sont en règle avec les contributions et cotisations dont
ils sont redevables envers ces organismes.
La Cour peut également exercer un contrôle du
compte d'emploi des ressources collectées auprès du public, dans le cadre de
campagnes menées à l'échelon national par tout organisme public ou privé
faisant appel à la générosité publique. Ce contrôle a pour but de vérifier la
conformité des dépenses engagées par ces organismes aux objectifs poursuivis et
annoncés par l'appel à cette générosité publique. S'il y a lieu, il peut
comporter des vérifications auprès des organismes qui ont été bénéficiaires des
ressources collectées dans le cadre de ces campagnes.
Enfin, par
la Commission de
vérification des comptes et de contrôle des entreprises publiques,
la Cour a la faculté d'exercer
un contrôle de la gestion de tout organisme bénéficiant, sous quelque forme que
ce soit, du concours financier ou de l'aide économique de l'Etat ou des
organismes publics qui relèvent de
la
Cour, conformément aux dispositions des articles 47 à 51 de
la loi 90.07 du 26 juin 1990 ainsi que du concours financier de l'Union
Economique et Monétaire Ouest Africaine.
Article 28.
La
Cour a, en
chambre de discipline financière, compétence pour sanctionner les fautes de
gestion et prononcer des amendes, dans les cas prévus par la présente loi.
CHAPITRE IV
De la procédure
devant
la Cour des
comptes
Article 29.
La Cour des comptes exerce de plein droit les
compétences prévues dans la présente loi, soit dans le cadre du programme
annuel qu'elle définit soit sur demande particulière du Gouvernement ou du
Parlement.
Article 30.
La
Cour est
habilitée à se faire communiquer tous documents de quelque nature que ce soit,
relatifs à la gestion des services ou organismes soumis à son contrôle. Pour
les besoins de leurs enquêtes, les magistrats et rapporteurs exercent
directement le droit de communication que les agents de services financiers de
l'Etat tiennent de la loi.
Les agents des
services financiers ainsi que les commissaires aux comptes des organismes
contrôlés sont déliés du secret professionnel à l'égard des magistrats et
rapporteurs de
la Cour,
à l'occasion des enquêtes que ceux-ci effectuent dans le cadre de leurs
missions.
Les magistrats et les rapporteurs ont, dans l'exercice de leurs fonctions et
dans la limite de leurs attributions, un droit d'accès permanent dans tous les
bureaux, locaux ou dépendances des organismes soumis au contrôle de
la Cour.
Tout refus
injustifié soit de communiquer les renseignements ou documents demandés, soit
de laisser visiter les locaux, soit de répondre à une convocation est passible
d'une amende de
100.000 F
minimum et de
1.000.000
F maximum, délibérée en chambres réunies. Lorsque le
refus est persistant, les montants de l'amende sont portés au double. En cas
d'entrave caractérisée, outre les sanctions disciplinaires ou administratives
qui peuvent être demandées par
la
Cour, le Président de
la Cour peut désigner un commis d'office, à la place
du responsable de l'entrave et à ses frais.
Toute
destruction de preuve ou de pièces justificatives est considérée comme une
entrave caractérisée et peut en outre faire l'objet de poursuites pénales.
La Cour prend toutes dispositions pour assurer
le secret de ses investigations.
Article 31. Sauf exceptions prévues dans la présente
loi, la procédure suivie devant
la
Cour des comptes est écrite et contradictoire.
Dans les
procédures juridictionnelles, lorsqu'il y a prononcé d'une amende, les parties
peuvent se faire assister par un avocat de leur choix sans que cette assistance
puisse valoir représentation en matière de jugement des comptes.
Article 32. Les délibérations de
la Cour sont exprimées en la
forme d'arrêts ou de communications aux intéressés, aux pouvoirs publics ou aux
autorités administratives compétentes.
Elles sont prises
à la majorité des voix, le Président de séance ayant voix prépondérante en cas
de partage de celles-ci.
A l'exception
de l'audience plénière solennelle, les séances des diverses formations se
déroulent à huis clos.
Article 33.
La
Cour juge
en premier et dernier ressort et ses arrêts sont, à peine de nullité, motivés.
Les voies de recours admises contre les arrêts définitifs sont la révision
devant
la Cour
des comptes et la cassation devant le Conseil d'Etat.
L'introduction
d'une procédure de révision ou de cassation ne fait pas obstacle à l'exécution
de l'arrêt attaqué, sauf sursis à exécution ordonné par le Président de
la Cour, après avis du
commissaire du Droit.
Les arrêts
définitifs de
la Cour
des comptes sont revêtus de la formule exécutoire lorsqu'ils donnent lieu à la
fixation d'une amende ou la prononciation d'un débet.
Dans ce cas,
leur exécution est poursuivie par toutes les voies de droit, à la diligence du
ministre chargé des finances. Un rapport sur l'état des procédures de
recouvrement, en cours ou achevées dans l'année, est adressé chaque année par
le ministre chargé des finances au Président de
la République, au Premier
ministre et au Président de
la
Cour des comptes.
CHAPITRE V.
Du Jugement Des Comptes
Article 34.- Tout comptable public doit rendre compte
de sa gestion devant
la Cour.
Cependant, sous
réserve du droit d'évocation de
la
Cour des comptes exercé par voie d'arrêt, le trésorier
général apure les comptes présentés par les comptables des organismes publics
d'Etat désignés par la réglementation en vigueur.
- Si
le comptable est déchargé ou quitte, sa décision produit les mêmes effets
qu'une décision de
la Cour.
- En
cas de débet, le trésorier général en fixe le montant à titre conservatoire et
transmet le dossier et les pièces justificatives à
la Cour des comptes qui, après
demande de justification au comptable, statue à titre définitif.
De la même
façon, les trésoriers payeurs régionaux procèdent à l'apurement administratif
des comptes des comptables des collectivités locales prévu à l'article 342 du
code des collectivités locales.
Cinq mois après
la clôture de chaque gestion, les comptables publics sont tenus de présenter
leur compte de gestion accompagné de toutes les pièces justificatives, par
l'intermédiaire de leur supérieur hiérarchique qui s'assure que les comptes
sont en état.
Tout comptable
public qui ne présente pas ses comptes dans le délai prescrit peut être
condamné par la chambre compétente à une amende dont le montant est fixé par
décret. Cette amende est recouvrée conformément aux dispositions de l'article
37.
Article 35.
La
Cour des
comptes est tenue de conserver les pièces justificatives de recettes et
dépenses reçues pendant un délai minimum de quatre années à partir de la fin de
l'année financière à laquelle se rattachent lesdites pièces.
La Cour peut, d'un commun accord avec le
ministère chargé des finances, déterminer périodiquement les pièces
justificatives qui ne seront pas envoyées à
la Cour mais conservées par les comptables pendant
le même délai.
Ce délai est
porté à cinq ans en ce qui concerne les pièces générales, notamment le budget,
les états de l'actif et du passif, les restes à recouvrer et les restes à
payer.
Les pièces
jointes à l'appui des observations figurant aux rapports à fin d'arrêt sont
conservées pendant un an à partir de la notification de l'arrêt définitif s'y
rapportant.
A l'expiration
de ce délai, il ne peut être procédé à la destruction d'aucune pièce sans
qu'elle n'ait été décidée par le Président de
la Cour.
Toutefois après
l'arrêt provisoire, le Président de
la
Cour peut, sur proposition du Président de chambre et après
consultation du commissaire du Droit, décider de la destruction immédiate des
pièces justificatives qui n'ont pas fait l'objet d'observations.
Le Président de
la Cour décide
également, dans les mêmes conditions, de la destruction des autres pièces, sous
réserve de l'application des dispositions des alinéas précédents.
Article 36. Le Président de chambre répartit les
dossiers des comptes entre les magistrats. D'autres rapporteurs peuvent
également être désignés, en concertation avec les présidents de
la Commission de
vérification des comptes et de contrôle des entreprises publiques et des autres
chambres de
la Cour,
parmi les magistrats de ces organes.
Les rapporteurs
procèdent à la vérification des comptes en se rapportant aux pièces de recettes
et de dépenses et aux justifications qui y sont annexées. Ils présentent leur
rapport à la chambre qui rend un arrêt provisoire.
Cet arrêt
provisoire est notifié au comptable à qui
la Cour adresse ses observations et injonctions
éventuelles.
Le Président de
la Cour des
comptes peut également confier à
la Commission de vérification des comptes et de
contrôle des entreprises publiques, le soin de s'assurer sur pièces et sur
place du bon emploi des crédits, fonds et valeurs gérés par les services de
l'Etat, les collectivités locales et les établissements publics.
Dès la fin de
la procédure,
la Commission
de vérification des comptes et de contrôle des entreprises publiques transmet
ses conclusions définitives au Président de
la Cour ainsi qu'à la chambre concernée qui statue
définitivement sur celles-ci.
Article 37. Le comptable public dispose d'un délai
maximum d'un mois pour produire ses justifications aux observations et
injonctions de la chambre.
Le retard du
comptable dans la production des justifications peut être sanctionné dans
l'arrêt définitif par une amende de 100.000 francs au maximum par injonction et
par mois de retard s'il ne fournit à la chambre aucune justification valable de
ce retard.
Le recouvrement
de cette amende est assuré par le receveur général du Trésor qui est
destinataire des extraits d'arrêts. Il est poursuivi par tous moyens de droit,
notamment par précompte sur le traitement, le salaire ou les indemnités perçues
par le comptable.
Article 38. Dès que l'affaire est complètement
instruite, la chambre rend un arrêt définitif.
Si le compte
est reconnu régulier, la chambre rend un arrêt de décharge à l'égard du
comptable demeuré en fonction ; à l'égard du comptable sorti de fonctions, elle
rend un arrêt de quitus qui donne main levée de toutes les sûretés et garanties
grevant les biens personnels du comptable au profit du Trésor public.
Si le compte
est irrégulier par défaut, c'est à dire si les écritures du comptable ne font
pas état de tous les deniers qu'il a reçus ou aurait dû recevoir, ou s'il a
payé à tort certaines dépenses, l'arrêt le déclare en " débet ".
Au vu de
l'arrêt de débet, le ministre chargé des Finances met en jeu la responsabilité
du comptable et, le cas échéant, les garanties correspondantes.
Article 39.
La
Cour juge
les comptes en premier et dernier ressort. Toutefois, le comptable ou ses
héritiers peuvent demander à
la
Cour la révision d'un arrêt définitif en produisant des
pièces justificatives retrouvées depuis ledit arrêt.
La Cour peut également procéder à la révision
d'un arrêt définitif pour cause d'erreur, omission, faux ou double emploi
reconnus par la vérification d'autres comptes soit d'office, soit à la demande
du ministre chargé des finances ainsi que des représentants des collectivités
locales et établissements publics concernés.
Article 40. Tout arrêt définitif rendu par une
chambre peut également, sur le pourvoi du comptable, du ministre chargé des
finances, des ministres concernés, ou du représentant légal de l'organisme dont
dépend le comptable, être soumis à Cassation pour cause d'incompétence, de vice
de forme ou de violation de la loi. Ce pourvoi est formé devant le Conseil
d'Etat dans le mois de la notification de l'arrêt.
Si
la Cassation est prononcée,
l'affaire est renvoyée pour jugement devant la formation " en chambres
réunies " de
la Cour
des comptes, conformément à l'article 16 de la présente loi. La formation de
renvoi est tenue de se conformer à l'arrêt de cassation qui a, à son égard,
l'autorité de la chose jugée.
Article 41. Les arrêts de
la Cour des comptes n'apportent
pas de changement au résultat général du compte en jugement. Toutefois, en cas
d'inexactitude dans le report du reliquat fixé par un arrêt précédent, le
comptable est tenu de passer les écritures de régularisation au compte de la
gestion en cours.
Article 42. Lorsque, à l'examen du compte, il
apparaît que le comptable peut encourir une sanction pénale, le Président de
la Cour en saisit le Garde des
sceaux, ministre de
la Justice
et en informe le ministre chargé des finances.
Article 43. Sous réserve des dispositions de
l'article 342 du Code des collectivités locales, le Président de
la Cour, sur proposition du Président
de chambre, peut, en cas d'encombrement de cette chambre, décider par
ordonnance que certains comptes concernant les collectivités locales et leurs
établissements publics subordonnés, seront apurés par un comptable supérieur du
Trésor.
CHAPITRE
VI.
Des
attributions de
la Cour
en matière de discipline financière
Article 44.
La Cour exerce une fonction juridictionnelle en
matière de discipline financière. Cette attribution s'exerce par la chambre de
discipline financière devant laquelle sont déférés les auteurs des faits visés
à l'article 49 de la présente loi.
Article 45. La formation en " chambre de
discipline financière " comprend un Président, deux conseillers maîtres et
deux conseillers référendaires.
La fonction de Président
de la chambre de discipline financière est occupée par un des présidents de chambre
désigné par le Président de
la
Cour, pour une durée minimum de deux ans. Il peut être
suppléé par l'un des autres présidents de chambre, dans l'ordre de nomination à
la Cour.
Les deux
conseillers maîtres et les deux conseillers référendaires sont désignés par le Président
de
la Cour pour
deux ans renouvelables.
Un conseiller
rapporteur est désigné pour instruire chaque affaire par le Président de la
chambre parmi les autres membres de
la Cour. Il a voix délibérative pour les dossiers
dont il a la charge.
Article 46. Les fonctions du ministère public sont
assurées par le commissaire du Droit.
Article 47. La chambre de discipline financière
dispose d'un greffier, désigné par le Président de
la Cour parmi les greffiers de
la Cour des comptes.
Article 48. Est déféré devant la chambre de
discipline financière, tout fonctionnaire civil, tout militaire, tout
magistrat, tout agent de l'Etat, tout membre du cabinet du Président de
la République, du
Président de l'Assemblée Nationale, du Président du Sénat, du Premier Ministre
ou d'un ministre, tout agent d'une collectivité publique ou d'un établissement
public, d'une société nationale, d'une société anonyme à participation publique
et généralement, de tout organisme bénéficiant du concours financier de la puissance
publique, toute personne investie d'un mandat public et toute personne ayant
exercé de fait lesdites fonctions, à qui il est reproché un ou plusieurs faits
énumérés à l'article 49 de la présente loi.
Article 49. Est punissable :
A/ - EN MATIERE DE DEPENSES :
1) le
fait de n'avoir pas soumis à l'examen préalable des autorités habilitées à cet
effet, dans les conditions prévues par les textes en vigueur, un acte ayant
pour effet d'engager une dépense;
2) le
fait d'avoir imputé ou fait imputer irrégulièrement une dépense ou d'avoir
enfreint la réglementation en vigueur concernant la comptabilité de matières ;
3) le
fait d'avoir passé outre au refus de visa d'une proposition d'engagement de
dépenses, excepté dans le cas où l'avis conforme du ministre chargé des finances
a été obtenu préalablement par écrit ;
4) le
fait d'avoir engagé des dépenses sans avoir reçu à cet effet délégation de
signature ;
5) le
fait d'avoir produit, à l'appui ou à l'occasion de ses liquidations, de fausses
certifications.
6) le
fait d'avoir enfreint la réglementation en vigueur concernant les marchés ou
conventions d'un des organismes visés à l'article 48 ci-dessus ;
Sont notamment
considérées comme infraction à la réglementation des marchés ou conventions :
a) le
fait d'avoir procuré ou tenté de procurer à un cocontractant de
l'administration ou d'un des organismes visés ci-dessus, un bénéfice anormal, à
dire d'expert ;
b) le
fait de n'avoir pas assuré une publicité suffisante aux opérations dans les
conditions prévues par les textes en vigueur ;
c) le
fait de n'avoir pas fait appel à la concurrence dans les conditions prévues par
les textes en vigueur.
7) - le
fait de s'être livré, dans l'exercice de ses fonctions, à des faits
caractérisés créant un état de gaspillage ;
Sont notamment
considérés comme réalisant un état de gaspillage :
a) les
transactions trop onéreuses pour la collectivité intéressée, en matière de
commande directe, de marché ou d'acquisition immobilière ;
b) les
stipulations de qualité ou de fabrication qui, sans être requises par les
conditions d'utilisation des travaux ou de fournitures, seraient de nature à
accroître le montant de la dépense ;
c) les
dépenses en épuisement de crédits.
8) le
fait d'avoir enfreint les règles régissant l'exécution des dépenses ;
9) le
fait d'avoir négligé, en sa qualité de chef de service responsable de leur
bonne exécution, de contrôler les actes de dépenses de ses subordonnés ;
10) le
fait d'avoir omis sciemment de souscrire les déclarations qu'ils sont tenus de
fournir aux administrations fiscales et sociales conformément aux codes en
vigueur ou d'avoir fourni sciemment des déclarations inexactes ou incomplètes.
B/ EN MATIERE DE RECETTES :
11) - le
fait d'avoir manqué de diligences pour faire prévaloir les intérêts de l'Etat
ou de toute autre personne morale visée à l'article 48 de la présente loi,
notamment le défaut de poursuite d'un débiteur ou de constitution de sûreté
réelle ;
12) le
fait d'avoir enfreint les règles régissant l'exécution des recettes ;
13) le
fait d'avoir négligé en sa qualité de chef de service responsable de leur bonne
exécution, de contrôler les actes de recettes effectués par ses subordonnés.
C/ DE MANIERE GENERALE :
14) - le
fait d'avoir dans l'exercice de ses fonctions ou attributions, en
méconnaissance de ses obligations, procuré ou tenté de procurer à autrui ou à
soi-même, directement ou indirectement, un avantage injustifié, pécuniaire ou
en nature, entraînant un préjudice pour le Trésor, la collectivité ou
l'organisme intéressé.
15) le
fait d'avoir entraîné la condamnation d'une personne morale de droit public ou
d'une personne de droit privé chargée de la gestion d'un service public, en
raison de l'inexécution totale ou partielle ou de l'exécution tardive d'une
décision de justice.
Article 50. Les auteurs des faits mentionnés à
l'article 49 de la présente loi ne sont passibles d'aucune sanction s'ils
peuvent exciper d'un ordre écrit préalablement donné, à la suite d'un rapport
particulier à chaque affaire, par leur supérieur hiérarchique dont la
responsabilité se substituera dans ce cas à la leur ou par le ministre compétent,
le Premier Ministre ou le Président de
la République.
Article 51. La chambre applique à titre de sanction
une amende dont le minimum ne peut être inférieur à 50.000 francs CFA et dont
le maximum pourra atteindre le double du traitement ou salaire brut annuel
alloué à l'auteur des faits à la date à laquelle ceux-ci ont été commis.
Article 52. Lorsque les personnes mentionnées à
l'article 48 ne perçoivent pas une rémunération ayant le caractère d'un
traitement ou salaire, le maximum de l'amende pourra atteindre le double du
montant du traitement ou salaire brut annuel correspondant à l'échelon le plus
élevé de la grille indiciaire de la fonction publique à l'époque des faits.
Article 53. Les sanctions prononcées par la chambre
de discipline financière ne pourront se cumuler que dans la limite des maxima
prévus aux articles 51 et 52.
Article 54. La chambre ne peut être saisie quatre
années révolues après le jour de la découverte des faits de nature à donner
lieu à l'application des sanctions prévues en matière de discipline financière.
Article 55. Ont qualité pour saisir la chambre de
discipline financière :
- le
Président de
la République
;
- le
Président de l'Assemblée nationale ;
- le
Président du Sénat ;
- le
Premier Ministre ;
- le
ministre chargé des Finances ;
- le Président
de
la Cour des
comptes ;
- le Président
de
la Commission
de vérification des comptes et de contrôle des entreprises publiques.
Les demandes de
poursuites sont adressées au commissaire du Droit.
Article 56. Le commissaire du Droit saisi informe
l'intéressé des poursuites dirigées contre lui par lettre recommandée avec avis
de réception, puis transmet le dossier au Président de la chambre qui désigne
un rapporteur pour procéder à l'instruction de l'affaire.
Article 57. Le conseiller rapporteur a qualité pour
procéder à toutes enquêtes et investigations utiles auprès de toute
administration, se faire communiquer tout document, même secret, et entendre
tout témoin.
Il peut, en
cours d'instruction, saisir le commissaire du Droit de ses constatations concernant
des personnes non visées dans l'ordre de poursuites.
Il peut
demander un complément d'information à l'inspection générale d'Etat ou à
l'organe habilité à cet effet, sous le couvert de l'autorité qui a saisi la
chambre.
Article 58. Lorsque l'instruction est terminée, le
conseiller rapporteur transmet le dossier au Président de la chambre qui le
communique au commissaire du Droit.
Si celui-ci
estime que l'affaire doit être classée sans suite, l'instruction n'ayant pas
apporté de charges suffisantes, il communique le dossier, avec ses conclusions,
à l'autorité qui l'a saisi.
Cette autorité
doit, dans un délai d'un mois, le requérir de poursuivre, de classer ou de
demander un supplément d'information.
En l'absence de
réponse dans ce délai, l'autorité saisie est présumée avoir acquiescé aux
conclusions du commissaire du Droit qui classe sans suite.
Si le
commissaire du Droit estime que l'affaire peut être renvoyée devant la chambre
ou s'il a été requis de poursuivre, il prononce le renvoi de l'affaire. Une
copie de ses conclusions est adressée à l'autorité qui a saisi la chambre de
discipline financière.
Article 59. En cas de renvoi par le commissaire du
Droit, le greffier avise le prévenu par voie d'huissier, qu'il peut, dans le
délai de huit jours, prendre connaissance au greffe de la chambre du dossier de
l'affaire qui contient les conclusions du commissaire du Droit. La consultation
du dossier fait l'objet d'un procès verbal du greffier qui est joint au
dossier.
S'il réside à
l'étranger, le prévenu peut, dans le délai de quinze jours à compter de la
consultation du dossier, produire un mémoire écrit qui est porté à la
connaissance du commissaire du Droit. S'il n'a pas pu prendre connaissance du
dossier, le délai de production du mémoire est porté à un mois à dater de la
réception de la notification par l'ambassade du Sénégal juridiquement
compétente pour son pays de résidence.
L'intéressé
peut demander l'assistance d'un conseil.
Article 60.-
Le Président de la
chambre prend une ordonnance pour l'ouverture de la session de jugement dans
laquelle il arrête le rôle des audiences. Le prévenu est alors cité à
comparaître par le greffier de la chambre. Si le prévenu réside à l'étranger,
la citation à comparaître comportera avertissement qu'il peut demander à être
jugé en son absence, par lettre adressée au Président qui sera jointe au
dossier.
Dans ce cas,
son défenseur, s'il en a un, est entendu.
Le prévenu est
alors, si la chambre agrée sa demande, jugé contradictoirement.
Des témoins
peuvent être entendus, soit à l'initiative de la chambre, soit sur requête du
commissaire du Droit ou du prévenu.
Les témoins
sont entendus sous la foi du serment, dans les conditions prévues aux articles
424 à 444 du code de procédure pénale.
L'intéressé,
soit par lui-même, soit par son conseil, est appelé à formuler oralement des
observations complémentaires au mémoire déposé. Le commissaire du Droit peut
également présenter des conclusions orales complémentaires à ses réquisitions.
Des questions
peuvent être posées par le Président ou avec l'autorisation de celui-ci par le
commissaire du Droit ou par les membres de la chambre au prévenu qui doit avoir
la parole le dernier.
Lorsque le
prévenu ne comparait pas au jour et à l'heure fixés par la citation à
comparaître, s'il n'a pas demandé à être jugé en son absence, il est fait
application des dispositions des articles 474 à 482 du code de procédure pénale
sur le jugement par défaut et l'opposition.
Les audiences
de la chambre ne sont pas publiques.
La chambre
siège en présence du commissaire du Droit, avec l'assistance du greffier. La
délibération a lieu hors la présence du ministère public. En cas de partage des
voix, celle du Président est prépondérante.
Article 61. Lorsque plusieurs personnes sont
impliquées dans la même affaire, leur cas peut être instruit et jugé
simultanément et faire l'objet d'un seul et même arrêt.
Article 62. Les arrêts de la chambre ne sont pas
susceptibles d'appel. Ils sont revêtus de la formule exécutoire et notifiés par
le secrétaire général de
la Cour
des comptes aux intéressés, à l'autorité qui a saisi la chambre, au ministre
chargé des Finances et le cas échéant aux ministres dont dépendent les
personnes condamnées.
Ils sont
publiés au journal officiel.
Article 63. Les arrêts de la chambre peuvent faire
l'objet d'un recours en cassation porté devant le Conseil d'Etat statuant dans
les conditions prévues par la loi organique sur le Conseil d'Etat.
En cas de
cassation, l'affaire est renvoyée devant la formation " en chambres
réunies " de
la Cour
des comptes.
Article 64. Les arrêts de la chambre de discipline
financière peuvent également faire l'objet d'un recours en révision devant les
chambres réunies de
la Cour
des comptes s'il survient un fait nouveau de nature à mettre le prévenu hors de
cause. Ce recours peut être demandé par les personnes condamnées ou leurs
héritiers en cas de décès, ou par
la
Cour des comptes si elle a connaissance des faits nouveaux
susceptibles de justifier la révision des arrêts prononcés.
Article 65. Les amendes prononcées par application
des articles 51 et 52 de la présente loi présentent le même caractère que les
amendes prononcées par
la Cour
des comptes. Elles ne peuvent faire l'objet d'aucune remise ou décharge, sauf
grâce présidentielle.
Le recouvrement
en est assuré par le comptable chargé du recouvrement selon les modalités de
l'article 37 de la présente loi.
Article 66. Les poursuites devant la chambre de
discipline financière ne font pas obstacle à l'exercice de l'action pénale ou
disciplinaire de droit commun. Si l'instruction ou la délibération sur
l'affaire laisse apparaître des faits susceptibles de constituer un délit ou un
crime, le Président de
la Cour
transmet le dossier au Garde des Sceaux, ministre de
la Justice et en informe le
ministre chargé des finances. De la même façon, si une sanction disciplinaire
peut être encourue, le Président de
la
Cour communique le dossier à l'autorité compétente.
CHAPITRE VII.
Du contrôle non juridictionnel
Article 67. Le contrôle exercé par
la Cour des comptes en vertu des
articles 26 et 27 de la présente loi vise à apprécier la qualité de la gestion
et à formuler, éventuellement, des suggestions sur les moyens susceptibles d'en
améliorer les méthodes et d'en accroître l'efficacité et le rendement.
Ce contrôle
englobe tous les aspects de la gestion.
La Cour apprécie la réalisation des objectifs
assignés, l'adéquation des moyens utilisés, les coûts des biens et services
produits, les prix pratiqués et les résultats financiers. Le contrôle porte
également sur la régularité et la sincérité des comptabilités ainsi que sur la
matérialité des opérations qui y sont décrites.
En aucun cas,
ce contrôle ne peut permettre d'ingérence dans la gestion des entités
contrôlées.
Article
68. A des périodes déterminées par les textes en vigueur,
les ordonnateurs des dépenses publiques transmettent à
la Cour des comptes la situation
des dépenses engagées. Ces situations comportent, par imputation budgétaire, le
montant des crédits ouverts, celui des ordonnancements, les crédits restant
disponibles et, le cas échéant, les dépassements avec justification de l'acte
qui les a autorisés.
Les pièces
ayant permis la préparation et l'exécution de l'engagement, de la liquidation,
du mandatement et, éventuellement, du paiement de la dépense sont conservées
par les ordonnateurs pendant les délais prescrits par les textes et tenues à la
disposition de
la Cour
des comptes qui peut en obtenir communication ou copie chaque fois qu'elle le
juge nécessaire. Il en est de même des pièces concernant les recettes.
Article 69. Les organismes visés à l'article 27
doivent tenir à la disposition de
la
Cour, six mois suivant la clôture de l'exercice et pendant
cinq années, leurs budgets, bilans, comptes de résultats et tous les documents
comptables et extra comptables ayant permis de les établir.
Les procès
verbaux des conseils d'administration et de surveillance, des comités de
direction, des assemblées générales ordinaires ou extraordinaires, les
circulaires internes, les audits ou expertises réalisés ainsi que les rapports
des commissaires aux comptes sont conservés pendant cinq ans à la disposition
de
la Cour.
Article 70.
La Cour des comptes, statuant en matière de
comptabilité publique, est chargée également du contrôle administratif des
comptes de matières des administrations publiques. Elle rend une décision
particulière sur chaque compte individuel de matières. Elle produit également
une déclaration de conformité attestant la concordance de l'ensemble des
comptes individuels de matières avec les comptes généraux des ministères.
Dans les services et organismes qui tiennent des comptabilités de matières un
rapport sur la gestion de ces matériels retraçant les opérations effectuées
dans l'année, l'utilisation des stocks, leur renouvellement, les pertes
constatées et les responsabilités encourues est adressé à
la Cour par l'autorité
compétente.
Article 71.
La
Cour peut
entendre, sur ordonnance de son Président, tout fonctionnaire, tout
gestionnaire de fonds et de biens publics ainsi que tout membre d'un corps de
contrôle.
L'ordonnance
est transmise par la voie hiérarchique. En cas d'urgence,
la Cour notifie directement
l'ordonnance et en avise alors le supérieur hiérarchique de l'intéressé.
La Cour peut entendre également toute personne
concernée directement ou indirectement par l'affaire examinée dans les formes
prévues à l'article 30 de la présente loi.
Article 72. Si
la Cour découvre, lors d'un contrôle des faits qui
relèvent de ses compétences en matière de discipline financière, elle s'en
saisit directement en application des dispositions de l'article 55 de la
présente loi.
Article 73. Le rapporteur procède à l'examen des
états financiers, notamment bilans et documents annexes et en tire toutes les
conclusions sur les résultats et la qualité de la gestion. Il établit un
pré-rapport qui est communiqué par le Président de chambre aux dirigeants du
service ou de l'organisme contrôlé qui doivent répondre dans le délai d'un
mois, par mémoire écrit. Ce mémoire est à la fois transmis au rapporteur et au
magistrat contre-rapporteur.
Le dossier
complet est ensuite transmis au commissaire du Droit pour ses conclusions.
A l'issue de
cette procédure, la chambre concernée, après audition des parties s'il lui
paraît nécessaire d'éclaircir certains points, arrête définitivement le rapport
dans lequel elle exprime son avis sur la régularité et la sincérité des
comptes, propose le cas échéant les redressements qu'elle estime nécessaires,
les sanctions qui paraissent s'imposer et porte un avis sur la qualité de la
gestion. Elle signale enfin les modifications qui lui paraissent devoir être
apportées à la structure ou à l'organisation de l'organisme contrôlé.
Après
délibération, si la chambre a constaté des irrégularités dues aux
administrateurs, relevé des lacunes dans la réglementation ou des insuffisances
dans l'organisation administrative et comptable, elle informe, par voie de
référé du Président de
la Cour,
les dirigeants des organismes contrôlés, les ministres intéressés ou les
autorités de tutelle et leur demande de faire connaître à
la Cour les mesures prises en
vue de faire cesser les errements constatés.
Dans chaque
ministère, un fonctionnaire de l'administration centrale dont la désignation
est notifiée à
la Cour,
est chargé de veiller à la suite donnée aux référés.
CHAPITRE VIII.
Dispositions
transitoires et finales
Article 74. Les arrêts de
la Cour des comptes sont rendus
au nom du peuple sénégalais. Les arrêts et actes de
la Juridiction sont
signifiés par exploits d'huissier.
Les arrêts et
actes de
la Juridiction
sont dispensés de la formalité du timbre et de l'enregistrement, ainsi que
leurs ampliations ou expéditions.
Article 75.
La Cour et les magistrats sont protégés,
conformément aux dispositions de
la Constitution, du code pénal et des lois
particulières en vigueur, contre les menaces, outrages, attaques, injures et
diffamations dont ils pourraient être l'objet.
Article 76. Le Président de
la Cour des comptes peut
requérir l'assistance de la force publique pour assurer la protection de
la Cour et de ses magistrats
dans l'exercice de leurs fonctions, le bon déroulement de leurs missions et la
sauvegarde des bâtiments et archives.
Article
77. A titre exceptionnel, lors de la création de la
nouvelle Cour des comptes, le Président de
la Cour, tous les magistrats et le nouveau
commissaire du Droit prêtent serment, conformément à l'article 11 de la
présente loi, même s'ils ont déjà prêtés serment dans une fonction précédente.
Article 78. Les procédures engagées devant
la Cour interrompent toute
prescription des actions pouvant se rapporter aux comptes ou aux affaires objet
de ces procédures.
Article 79. Les conditions d'application de la
présente loi seront en tant que de besoin fixées par décret.
Article 80. Sont abrogées ou modifiées toutes les
dispositions légales ou réglementaires contraires à celles de la présente loi
et notamment, telles qu'elles ont été modifiées ou complétées :
- l'article
2 et le chapitre VI du titre III de la loi organique n°96-30 du 21-10-96 sur le
Conseil d'Etat ;
- les
articles 12, 342 et 343 de la loi n°96-06 portant code des collectivités
locales, la " Cour des comptes " remplaçant la " Section des
comptes " ou le " Conseil d'Etat " ;
- la
loi n°98-20 du 26 mars 98 portant création de
la Cour de discipline
financière.
La présente loi
organique sera exécutée comme loi de l'Etat.
Fait
à Dakar, le 17 février 1999
Par
le Président de
la
République
Abdou DIOUF
Le Premier
Ministre
Mamadou
Lamine LOUM