
A la page 215 du livre « Sénégal, histoire des conquêtes démocratiques », il est écrit « Me Valdiodio Ndiaye, ministre de l’Intérieur, assurant l’intérim du Président du Conseil de Gouvernement, Mamadou Dia empêché, prit la parole pour lire, au nom du Conseil de Gouvernement, sur un ton à la ferme et courtois, et en des termes explicites et revendicatifs, un discours en faveur de l’indépendance nationale :
- Monsieur le Président
Le Sénateur-Maire de Dakar (Lamine Guèye) vient de vous adresser au nom de la ville qui vous a accueilli aujourd’hui, et avec toute l’autorité qui s’attache à sa double qualité de premier magistrat municipal et de doyen des hommes politiques sénégalais, des paroles de bienvenue auxquelles veut d’abord s’associer le Conseil de gouvernement du Sénégal, dont je suis aujourd’hui l’interprète, en l’absence de Monsieur le Président Mamadou Dia retenu en Suisse par une cure que ses médecins lui ont déconseillé d’interrompre »
Telles sont les raisons officielles annoncées au Général de Gaulle et à toute la population venue à l’accueil pour l’absence de Mamadou Dia. Raison d’autant plus officielle, qu’elle émane de celui qui assure son intérim, Me Valdiodio Ndiaye en sa qualité de Ministre de l’Intérieur et qui est investi dans le rôle d’interprète du Conseil de gouvernement pour délivrer un message au nom, et du chef et du Conseil de gouvernement du Sénégal. Cette absence pour raison médicale officielle - une cure en Suisse – est traduite par Souleymane Ndéné Ndiaye par la formule lapidaire « Mamadou Dia s’est payé un voyage en Suisse pour se soigner ».
Mais l’intéressé lui-même, à savoir le Président du Conseil du gouvernement du Sénégal Mamadou Dia va plus loin dans la justification de son absence à la cérémonie du 26 août 1958. En effet dans ses « Mémoires d’un militant du tiers-monde » éditions Publisud Mai 1985, Mamadou Dia donne son point de vue dans les pages qu’il consacre à l’évènement et les commentaires qu’il fait de l’accueil mouvementé réservé au Général de Gaulle.
Page 90, Mamadou Dia écrit : « Assurément nous avons été contre l’accession de de Gaulle au pouvoir. C’est, d’ailleurs, ce qui explique que nous étions, pour la plupart, pour voter non au Référendum et, de fait, j’avais même, en tant que Secrétaire Général de l’U.P.S., fait un rapport dans le sens d’un vote négatif ». Cet aveu est d’une certaine gravité car la prise de position de Mamadou Dia pour voter non au Référendum du 28 septembre 1958 ne reposerait que sur une hostilité à l’accession du Général de Gaulle au pouvoir et non pas sur une volonté manifeste de libérer le peuple sénégalais du joug colonial.
Dans la suite page 91, Mamadou Dia poursuit : « En vérité, ce sont les manifestations de Dakar (celles des porteurs de pancartes à l’accueil du 26 août 1958) qui ont complètement chamboulé mon projet. Je n’avais pas prévu ces manifestations. J’étais parti (j’étais absent) parce que de Gaulle venait à Dakar et ne s’était pas du tout donné la peine d’en informer les Chefs de Gouvernement* que nous étions. J’ai dit : «il n’y a pas de raison que je reste là pour l’attendre ». Je suis, donc, parti, mais vraiment sans me douter qu’il allait y avoir des manifestations. Senghor était également en Normandie ». Ce serait donc pour des raisons d’amour propre blessé que Mamadou Dia Président du Conseil du gouvernement du Sénégal aurait refusé d’être présent à Dakar pour accueillir le Général de Gaulle en campagne pour le Référendum qui allait décider du sort des relations entre la France et ses peuples colonisés d’Afrique. Mamadou Dia reconnaît dans le paragraphe qui suit : « Contrairement à ce que l’on croit, nous (Senghor et lui) ne nous sommes pas du tout concertés. Nous ne nous attendions pas du tout à ces manifestations. ».
Pour l’absence de Senghor c’est toujours Mamadou Dia qui en donne la justification dans le paragraphe suivant où il écrit : « La vérité, l’évidence est que c’est à notre insu que les choses se sont passées. Pour Senghor, les vacances, c’est quelque chose de sacré. Il avait décidé de partir tel mois ; le ciel pouvait se retourner, au Sénégal, il n’était question, pour lui, de renoncer à ses vacances ». Ces vacances sont également évoquées par Souleymane Ndéné Ndiaye quand il affirme que Senghor est allé passer ses vacances en Normandie, la Normandie étant une région de France où la famille de Madame Colette Senghor son épouse possédait une propriété dans laquelle le couple Senghor venait passer les vacances d’été.
Donc au moment où le sort des peuples colonisés d’Afrique se jouait avec ce Référendum pour la nouvelle Constitution de la République française et ses colonies, Senghor et Mamadou Dia auraient fait le choix de s’absenter lors de la visite de campagne de de Gaulle et pour éviter de se trouver en face de lui et lui présenter les revendications de leurs peuples. Surtout que Mamadou Dia ajoute que « le comportement cavalier de de Gaulle m’incitait à ne pas l’accueillir ». C’est donc Valdiodio Ndiaye que l’histoire retiendra d’avoir eu le courage d’affronter le Général de Gaulle et de lui traduire dans son discours les aspirations du peuple sénégalais.
Même les commentaires faits par Mamadou Dia dans son livre (page 91) laissent perplexes d’aucuns. En effet, il commente ainsi les évènements de ce 26 août 1958 : « les manifestations, il faut le dire, ont été organisées par des gauchistes. Valdiodio en accueillant de Gaulle en termes assez raides (sic), a fait un discours conforme à mes positions. Il savait que j’étais pour voter « non » au référendum. En effet, j’avais fait – avant mon entretien avec Senghor - mon rapport au Parti qui concluait au « non ». Aussi, la seule surprise pour moi ce furent les manifestations de Dakar et non point le discours de Valdiodio… Après ces incidents, je suis allé en Normandie pour rencontrer Senghor. Nous avons, alors, fait apparaître un communiqué pour déplorer ce qui s’était passé ».
Ces gauchistes dont parle Mamadou Dia, ce sont les porteurs de pancartes d’alors composés de jeunes de l’UPS, section territoriale du PRA et des militants du PAI de Majhemout Diop.
* : De Gaulle a été accueilli à Madagascar, à Brazzaville, à Abidjan, et à Conakry, avant l’étape de Dakar, par les chefs de Conseil de gouvernement des différents territoires.
- Monsieur le Président
Le Sénateur-Maire de Dakar (Lamine Guèye) vient de vous adresser au nom de la ville qui vous a accueilli aujourd’hui, et avec toute l’autorité qui s’attache à sa double qualité de premier magistrat municipal et de doyen des hommes politiques sénégalais, des paroles de bienvenue auxquelles veut d’abord s’associer le Conseil de gouvernement du Sénégal, dont je suis aujourd’hui l’interprète, en l’absence de Monsieur le Président Mamadou Dia retenu en Suisse par une cure que ses médecins lui ont déconseillé d’interrompre »
Telles sont les raisons officielles annoncées au Général de Gaulle et à toute la population venue à l’accueil pour l’absence de Mamadou Dia. Raison d’autant plus officielle, qu’elle émane de celui qui assure son intérim, Me Valdiodio Ndiaye en sa qualité de Ministre de l’Intérieur et qui est investi dans le rôle d’interprète du Conseil de gouvernement pour délivrer un message au nom, et du chef et du Conseil de gouvernement du Sénégal. Cette absence pour raison médicale officielle - une cure en Suisse – est traduite par Souleymane Ndéné Ndiaye par la formule lapidaire « Mamadou Dia s’est payé un voyage en Suisse pour se soigner ».
Mais l’intéressé lui-même, à savoir le Président du Conseil du gouvernement du Sénégal Mamadou Dia va plus loin dans la justification de son absence à la cérémonie du 26 août 1958. En effet dans ses « Mémoires d’un militant du tiers-monde » éditions Publisud Mai 1985, Mamadou Dia donne son point de vue dans les pages qu’il consacre à l’évènement et les commentaires qu’il fait de l’accueil mouvementé réservé au Général de Gaulle.
Page 90, Mamadou Dia écrit : « Assurément nous avons été contre l’accession de de Gaulle au pouvoir. C’est, d’ailleurs, ce qui explique que nous étions, pour la plupart, pour voter non au Référendum et, de fait, j’avais même, en tant que Secrétaire Général de l’U.P.S., fait un rapport dans le sens d’un vote négatif ». Cet aveu est d’une certaine gravité car la prise de position de Mamadou Dia pour voter non au Référendum du 28 septembre 1958 ne reposerait que sur une hostilité à l’accession du Général de Gaulle au pouvoir et non pas sur une volonté manifeste de libérer le peuple sénégalais du joug colonial.
Dans la suite page 91, Mamadou Dia poursuit : « En vérité, ce sont les manifestations de Dakar (celles des porteurs de pancartes à l’accueil du 26 août 1958) qui ont complètement chamboulé mon projet. Je n’avais pas prévu ces manifestations. J’étais parti (j’étais absent) parce que de Gaulle venait à Dakar et ne s’était pas du tout donné la peine d’en informer les Chefs de Gouvernement* que nous étions. J’ai dit : «il n’y a pas de raison que je reste là pour l’attendre ». Je suis, donc, parti, mais vraiment sans me douter qu’il allait y avoir des manifestations. Senghor était également en Normandie ». Ce serait donc pour des raisons d’amour propre blessé que Mamadou Dia Président du Conseil du gouvernement du Sénégal aurait refusé d’être présent à Dakar pour accueillir le Général de Gaulle en campagne pour le Référendum qui allait décider du sort des relations entre la France et ses peuples colonisés d’Afrique. Mamadou Dia reconnaît dans le paragraphe qui suit : « Contrairement à ce que l’on croit, nous (Senghor et lui) ne nous sommes pas du tout concertés. Nous ne nous attendions pas du tout à ces manifestations. ».
Pour l’absence de Senghor c’est toujours Mamadou Dia qui en donne la justification dans le paragraphe suivant où il écrit : « La vérité, l’évidence est que c’est à notre insu que les choses se sont passées. Pour Senghor, les vacances, c’est quelque chose de sacré. Il avait décidé de partir tel mois ; le ciel pouvait se retourner, au Sénégal, il n’était question, pour lui, de renoncer à ses vacances ». Ces vacances sont également évoquées par Souleymane Ndéné Ndiaye quand il affirme que Senghor est allé passer ses vacances en Normandie, la Normandie étant une région de France où la famille de Madame Colette Senghor son épouse possédait une propriété dans laquelle le couple Senghor venait passer les vacances d’été.
Donc au moment où le sort des peuples colonisés d’Afrique se jouait avec ce Référendum pour la nouvelle Constitution de la République française et ses colonies, Senghor et Mamadou Dia auraient fait le choix de s’absenter lors de la visite de campagne de de Gaulle et pour éviter de se trouver en face de lui et lui présenter les revendications de leurs peuples. Surtout que Mamadou Dia ajoute que « le comportement cavalier de de Gaulle m’incitait à ne pas l’accueillir ». C’est donc Valdiodio Ndiaye que l’histoire retiendra d’avoir eu le courage d’affronter le Général de Gaulle et de lui traduire dans son discours les aspirations du peuple sénégalais.
Même les commentaires faits par Mamadou Dia dans son livre (page 91) laissent perplexes d’aucuns. En effet, il commente ainsi les évènements de ce 26 août 1958 : « les manifestations, il faut le dire, ont été organisées par des gauchistes. Valdiodio en accueillant de Gaulle en termes assez raides (sic), a fait un discours conforme à mes positions. Il savait que j’étais pour voter « non » au référendum. En effet, j’avais fait – avant mon entretien avec Senghor - mon rapport au Parti qui concluait au « non ». Aussi, la seule surprise pour moi ce furent les manifestations de Dakar et non point le discours de Valdiodio… Après ces incidents, je suis allé en Normandie pour rencontrer Senghor. Nous avons, alors, fait apparaître un communiqué pour déplorer ce qui s’était passé ».
Ces gauchistes dont parle Mamadou Dia, ce sont les porteurs de pancartes d’alors composés de jeunes de l’UPS, section territoriale du PRA et des militants du PAI de Majhemout Diop.
* : De Gaulle a été accueilli à Madagascar, à Brazzaville, à Abidjan, et à Conakry, avant l’étape de Dakar, par les chefs de Conseil de gouvernement des différents territoires.