ANAMBE- Pour maximiser les exploitations : La Sodagri ressuscite les coopératives agricoles



Les coopératives agricoles avaient existé du temps de l’Office national de commercialisation agricole et de développement (Oncad) puis ont disparues par les mêmes pratiques. Du coup, les unions de producteurs mises en place dans le bassin de l’Anambé tardent à mettre les producteurs en confiance pour une meilleure mise en valeur des terres aménagées dans cette vallée au sud du pays. La Société de développement agricole et industriel de l’Anambé (Sodagri) est en train d’appuyer les producteurs à la création de coopératives agricoles, à côté des unions qui ne bénéficient plus de sa confiance. Par Abdoulaye KAMARA

Le processus de mise à l’écart de la Fédération des producteurs du bassin de l’Anambé (Feproba) a atteint sa vitesse de croisière. Dans les semaines à venir, ce sont des coopératives agricoles fédérant des sections villageoises qui vont servir d’interface entre les producteurs et la société dirigée par Abdou Fall. C’est la décision prise par les autorités de la Sodagri en réponse à une demande des producteurs. Le coordonnateur du projet de développement rural du bassin de l’Anambé (Paderba) a informé : «Ceci est une initiative du directeur général de la Sodagri, lancée après les multiples sollicitations des populations et des producteurs du fait des difficultés rencontrées dans la gestion des périmètres aménagées.» Amadou Diouf prononçait cette phrase lors d’une rencontre avec les producteurs portant sur les activités et perspectives du Paderba, et une concertation sur les possibilités de mise en place de sections villageoises.
C’est le deuxième point de l’ordre du jour qui a le plus retenu l’attention des participants. Il s’agissait d’introduire une innovation structurelle dans la gestion des producteurs en amont et en aval de l’activité de production. Pour ce faire, la Sodagri a commis deux consultants pour l’information des producteurs. A ces derniers, le consultant Djibril Guèye a expliqué les tenants et aboutissants de cette réorganisation en vue des organisations de producteurs de la vallée de l’Anambé. «La coopérative est une entité zonale où les producteurs, pour une efficacité d’action, unissent leurs efforts afin de remplir tous les critères de compétitivité. La coopérative agricole apporte à ses membres le crédit de campagne et les moyens d’avoir à crédit tout ce dont ils ont besoin : engrais, semences, fongicides, carburant etc. Elle facilite la commercialisation à ses membres en trouvant avant la récolte, un ou des acquéreurs pour l’achat de la totalité de la production. Elle joue sur le coût des produits pour générer des bénéfices au profit de la communauté.» La coopérative agricole devra donc s’appuyer sur des sections villageoises nées de la volonté des habitants d’un même village à unir leurs forces. «Les sections villageoises ont l’avantage de regrouper des personnes qui se connaissent, savent mesurer à juste raison les capacités agraires de chaque membre et qui, outre les statuts et règlements mis en place, sont sous le contrôle du chef de village qui, déjà jouit d’une grande respectabilité», a ajouté Ibrahima Gaye, consultant en gestion organisationnelle. Les consultants de la Sodagri, anciens fonctionnaires de la défunte Oncad, sont partis des expériences de cet office pour proposer les coopératives aux partenaires du Dg Abdou Fall. En plus, «une mission de producteurs a été organisée dans la vallée du fleuve Sénégal en relation avec la Saed, en vue de s’enquérir des modes d’organisations des producteurs dans cette zone de grands aménagements hydro-agricoles et de grande production en irrigué, semblable à tout égard à ce qui se fait dans le bassin de l’Anambé», renseigne Amadou Diouf, patron du Paderba.
Toutes ces initiatives constituent des tentatives de réponses aux tares et insuffisances des unions de producteurs existant dans la vallée et qui plombent l’exploitation des terres qui y sont aménagées à coût de milliards de francs, selon M. Diouf.

Ce qui devrait changer
A la lecture des explications données par les consultants de la Sodagri à propos du mode de fonctionnement des coopératives agricoles à mettre en place dans le bassin rizicole de l’Anambé, les producteurs devront sûrement, reprendre confiance pour s’investir à fond dans l’exploitation des terres aménagées. En effet, ces coopératives, si elles fonctionnent comme dit, devront trouver du crédit de campagne à ses membres. Du fait des saisons désastreuses, la Feproba (fédération des producteurs du bassin de l’Anambé), en disgrâce auprès de la Sodagri, ne parvenait pas à payer ses dettes de campagne auprès de la Caisse nationale de crédit agricole (Cncas) ou du Pmia (Programme de modernisation et d’intensification agricole). Des casseroles qui dissuadent ces institutions à lui renouveler leur confiance. Les exploitants de cette vallée, au faible pouvoir financier, ne peuvent se passer de crédit, sont obligés de réduire leurs cultures, s’ils n’y renoncent pas tout simplement.
En outre, fini le casse-tête de l’écoulement de leurs productions. Du moins, si les coopératives parviennent, comme dit, à trouver des acquéreurs avant même la production. A rappeler que dans ce bassin, les producteurs ne comptaient jusque là que sur des acquéreurs individuels, le plus souvent originaires de la Guinée Conakry. Ceux-ci viennent, d’habitude, pendant la récolte pour préfinancer les activités de récolte et post-récolte, ôtant, du coup, toute marge de manœuvre au paysan.
Dans la nouvelle optique, la section villageoise, cellule de base de la coopérative, va s’appuyer sur les valeurs de la communauté villageoise pour fonctionner, avec comme arbitre le chef de village qui, sur la base des informations sur les aptitudes et forces des candidats à la culture, distribue matériels et intrants. Une pratique qui devrait mettre un terme au surendettement et maintenir la confiance avec le ou les nouveaux partenaires.
Perspectives de la Sodagri pour les campagnes a venir
Tirant les enseignements des précédentes campagnes, en conformité avec les intentions de la direction générale de la Sodagri de participer à la réduction de la facture en riz du Sénégal, la cellule de coordination du Paderba a pris un certain nombre de dispositions à exécuter dès la campagne de contre-saison déjà ouverte. Il s’agit, selon son coordonnateur Amadou Diouf de «mettre à la disposition des producteurs et de façon gratuite, des batteuses, des décortiqueuses et des remorques pour faciliter les travaux de post-récolte, fixer et vulgariser les coûts des différentes prestations de service au niveau des différents secteurs ainsi que ceux de l’irrigation, coûts qui pourraient être revus à la baisse, compte tenu des intentions de culture enregistrées et de la tendance actuelle à la baisse du prix du carburant sur le plan mondial. A cela s’ajoute la mise en place d’un comité de suivi des intrants et du matériel agricole. Ce comité ouvert aux producteurs, a déjà réceptionné 700 tonnes d’engrais NPK et 850 tonnes d’urée et attend incessamment des herbicides et du matériel agricole qui les accompagne. Déjà, la Sodagri a mis 200 millions de francs pour l’achat de ces intrants qui seront donnés à crédit ou vendus au comptant aux producteurs».

Quel devenir pour la Feproba ?
«Je n’ai pas le pouvoir de dissoudre les unions de producteurs existantes, encore moins la Feproba. Seulement, ces unions ne font plus l’affaire de la Sodagri et de l’Etat du Sénégal, du fait de leurs agissements qui ont conduit à une mise en valeur insuffisante et à une faible productivité des investissements consentis par l’Etat dans cette partie à haut potentiel agricole». En clair, les unions vont cohabiter avec les sections villageoises et, la Feproba avec les coopératives.
Toutefois, ce sont les coopératives qui sont désormais les partenaires de la Sodagri. C’est-à-dire que les 200 millions de francs d’intrants payés par la société de développement devront être distribués en priorité aux membres des sections villageoises chapeautées par des coopératives, et, ce sont eux qui devront bénéficier des conseils et de la formation de la société de développement.
Pour Landing Diémé, président de la Feproba, «la Sodagri, veut faire de la Feproba une coquille vide. C’est tenter l’impossible. Dans tous les pays du monde, ce sont les unions hydrauliques qui gèrent les stations de pompage. Ce que veut la Sodagri, c’est que les crédits ne soient plus gérés par nous. Nous verrons jusqu’où la Sodagri ira dans sa logique.» Pour M. Diémé, en créant les coopératives, la Sodagri n’a ni plus ni moins que coupé l’âme des producteurs qu’est la Feproba. Il a la conviction que les coopératives ne survivront pas à la Feproba. Car, cette dernière se prévaut d’un patrimoine qui garantit sa survie. Un patrimoine composé d’un siège, d’une mutuelle d’épargne et de crédit (Meca), de motos et de magasins de stockages de céréales.
Le président des unions de producteurs de l’Anambé est conscient que ce patrimoine pourrait faire l’objet de polémiques entre sa structure et ceux qui ont décidé d’adhérer aux sections villageoises. Seulement, estime-t-il, «c’est une minorité de mécontents qui, parce que battus lors des renouvellements, ont répondu à l’appel divisionniste de la Sodagri. Mais, elle ne perd rien pour attendre, nous sommes en train d’étouffer des velléités de soulèvements que nous ne pourrons pas contenir à la longue» Du rififi garanti dans l’Anambé, dans les prochains jours.

Le Quotidien

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